1 novembre 2022 | Suisses
Le 24 février 2020, les parlementaires Samuel Bendahan (Vaud – PS) et Franziska Ryser (Saint-Gall – Les Verts) avaient déposé un postulat pour demander au Conseil fédéral d’examiner dans quelle mesure la Banque nationale suisse (BNS) peut soutenir les objectifs de développement durable de la Confédération. En réponse à ce postulat, le Conseil fédéral a adopté le 26 octobre 2022 un rapport intitulé « La Banque nationale suisse et les objectifs de développement durable de la Suisse ».
Selon le Conseil fédéral, l’adoption d’instruments en faveur de la protection du climat est la tâche du parlement et du gouvernement, et non pas de la BNS. Cette dernière prend certes en considération les enjeux climatiques, mais uniquement en lien avec son objectif principal : assurer la stabilité des prix. Ainsi, ce n’est que lorsque certains aspects de protection climatique altèrent ladite stabilité que la BNS en tient compte. L’on comprend qu’a contrario, elle ne saurait prendre un rôle actif à la protection du climat, par des investissements spécialement ciblés par exemple.
Le Conseil fédéral insiste également sur la répartition des compétences entre les institutions politiques et la BNS et sur l’indépendance nécessaire de cette dernière. De plus, il rappelle que la stabilité des prix visée par la BNS permet d’agrandir la marge de manœuvre dont dispose les autorités politiques pour prendre des mesures climatiques.
Le rapport du Conseil fédéral est disponible ici.
20 septembre 2022 | Suisses
Agir pour le climat : objectif principal
Le but des Avocat·e·s pour le Climat est de protéger le climat en portant des affaires devant les tribunaux suisses relatent La Liberté et le 12:45 de la RTS. L’agence de presse Keystone retranscrit la volonté des fondateur·rice·s de faire passer les plus gros pollueurs et le gouvernement, et non les citoyen·ne·s, du côté des accusé·e·s. Changement de paradigme donc pour ces avocat·e·s qui ont jusqu’ici défendu le plus souvent des activistes du climat poursuivi·e·s par l’État pour leurs actes de désobéissance civile. Pour reprendre les propos de Me Irène Wettstein, membre de l’association, recueillis par Keystone : « il s’agit de passer à l’offensive face à l’attentisme judiciaire en Suisse qui est regrettable ». Me Christian Delaloye, ancien Bâtonnier fribourgeois, abonde dans le même sens sur Radio Fribourg. Ce virage est relevé par de nombreux média, et Swissinfo n’hésite pas à le qualifier de « tournant stratégique dans les procès climatiques ».
Les Avocat·e·s pour le Climat sont déterminés à agir en Suisse, pays dont le gouvernement est encore épargné par les condamnations pour inaction climatique. Si les membres sont pour l’instant uniquement romands, la porte est ouverte à la collaboration d’avocat·e·s d’outre-Sarine rapporte le 24heures, alors qu’il a été précisé au micro de Radio Chablais que l’association est déjà en contact avec la Fondation Urgenda, qui avait obtenu gain de cause dans sa plainte contre le gouvernement néerlandais pour inaction.
Trouver d’autres voies judiciaires pour protéger le climat
Malgré de précédentes décisions parfois décevantes, les Avocat·e·s pour le Climat croient au potentiel du pouvoir judiciaire qui peut, si le gouvernement ne le fait pas, concrétiser les ambitions suisses en matière protection du climat relate Le Temps. Le quotidien évoque à ce titre la défaite judiciaire essuyée par des activistes du climat dans le cadre du procès du Block Friday à Fribourg. Cependant, les Avocat·e·s pour le Climat rappellent à la radio LFM qu’il existe d’importantes différences cantonales en la matière : les juges du canton de Genève tendent désormais à reconnaître que les actes pacifiques de ces manifestant·e·s sur le domaine public sont protégés par la liberté d’expression, à l’inverse de leurs collègues vaudois·e·s ou fribourgeois·e·s.
De plus, même s’il a été nié dans le cadre de certains procès que, d’un point de vue juridique, l’urgence climatique justifie des actes de désobéissance civile, il reste à emprunter d’autres voies, notamment à travers la bonne application des lois existantes en matière de protection de l’environnement.
Finalement, comme le mentionne 20 Minutes, ces actions pourront conduire à des jugements qui se joueront « moins sur les circonstances de manifestations sur le climat et davantage sur le fond du problème du réchauffement climatique ». Ce journal souligne également la plus grande facilité, dans ce type de procédures, à faire entendre des scientifiques en qualité de témoins, ce qui favorise une meilleure compréhension des juges et ainsi une justice plus protectrice de la planète.
Des actions concrètes de l’association
Pour atteindre son objectif, la nouvelle association romande a déjà deux idées d’actions qui pourraient s’ajouter aux environ 2’000 procès climatiques en cours dans le monde évoqués par Me Nussbaumer-Laghzaoui au micro de Prise de terre. D’une part, une procédure contre le Conseil fédéral qui n’a pas fait respecter les exigences de la Loi sur le CO2, du Protocole de Kyoto ou de l’Accord de Paris, causant des dommages à des agriculteurs suisses. Le Temps rapporte que l’association représenterait ces agriculteurs, lésés par l’inaction de la Confédération. D’autre part, une plainte dirigée contre une banque afin de dénoncer des actes constitutifs de concurrence déloyale dans le domaine de la finance dite « durable ». L’acteur financier visé présente aux investisseur·euse·s des fonds de placement comme « verts » alors mêmes que ceux-ci investissent dans des entreprises figurant parmi les plus polluantes de la planète, sans engagements concrets pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
Le Temps souligne par ailleurs l’absence de but lucratif des avocates et avocats membres de l’association, les procédures étant menées pro bono. Leur motivation est de rejoindre un « mouvement d’une ampleur exceptionnelle et inédite », pour reprendre les propos de Me Raphaël Mahaim, Conseiller national et membre de l’association, à Keystone.
15 septembre 2022 | Suisses
Le Tribunal fédéral (TF) a accueilli, les 11 et 12 septembre 2022, la « rencontre des Six » des cours constitutionnelles germanophones, de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et de la Cour européenne des droits de l’homme (CourEDH). Dans son communiqué, le TF précise que les participant·e·s ont notamment discuté du rôle de la justice en matière de protection du climat.
De tels échanges sont particulièrement souhaitables alors que la position des juges de Mon-Repos diffère de celle de la Cour constitutionnelle allemande et de la CourEDH sur plusieurs questions essentielles en matière de protection du climat.
Dans deux arrêts récents (ATF 147 IV 297 et 146 I 145), le TF a ainsi jugé que les catastrophes naturelles causées par le réchauffement climatique ne constituent pas un danger imminent au sens de l’art. 17 CP, respectivement que les atteintes subies du fait du réchauffement climatique ne sont pas actuelles au sens de l’art. 25a PA. A l’inverse, les juges de la Cour constitutionnelle allemande, s’appuyant notamment sur l’impératif intertemporel des liberté fondamentales, ont admis que la réalité climatique suppose que les incidences des actions entreprises aujourd’hui ne se manifesteront que dans le futur (arrêt de la Cour constitutionnelle allemande du 24 mars 2021, BvR 2656/18, BvR 96/20, BvR 78/20, BvR 288/20, BvR 96/20, BvR 78/20).
La jurisprudence du TF diffère également de celle de la CourEDH quant à l’interprétation des art. 10 et 11 CEDH, qui protègent les libertés d’expression et de réunion. Dans l’ATF 147 IV 297, le TF a ainsi refusé d’analyser les conditions d’application de ces normes au motif que l’action des activistes du climat s’était déroulée dans un espace privé. A l’inverse, la CourEDH a rappelé à de nombreuses reprises que les libertés d’expression et de réunion doivent aussi être garanties dans les espaces privés (p.ex. Baldassi et autres c/ France, Mariya Alekhina et autres c. Russie).
Des requêtes ont été introduites devant la CourEDH en relation avec chacun de ces deux arrêts et la position du TF pourrait donc être amenée à évoluer sur ces questions. Parallèlement, l’on peut également espérer que des échanges de vues informels tels que ceux intervenus lors de la « rencontre des Six » participent d’une telle évolution de la jurisprudence de notre Haute Cour.
15 juillet 2022 | Suisses
Le lundi 11 juillet 2022, quatre habitant·e·s de l’île de Pari, en Indonésie, ont ouvert une action civile contre Holcim devant le Friedensrichter de Zoug. Ils réclament en particulier la réparation du dommage qu’ils estiment en partie causé par les émissions de CO2 d’Holcim.
En effet, le cimentier Holcim a émis plus de sept milliards de tonnes de CO2 entre les années 1950 et 2021, selon une étude commandée par l’entraide protestante suisse. Cela représente 0,42 % de l’ensemble des émissions industrielles mondiales de CO2 depuis 1750, soit plus du double de ce que l’ensemble de la Suisse a émis sur la même période. Holcim est ainsi la multinationale la plus polluante de notre pays.
Après l’Allemagne (Lliuya v. RWE AG), les Pays-Bas (Milieudefensie et al. c. Royal Dutch Shell plc) ou encore les Etats-Unis (Native Vill. of Kivalina v. Exxon Mobil Corp.), la Suisse tient son premier procès climatique en responsabilité civile.
Suivez le ici : https://callforclimatejustice.org/fr/ .