27 octobre 2022 | Internationales
Volkswagen AG (VW) a été actionnée en justice par plusieurs fonds de pensions suédois, danois et anglais faisant partie de son actionnariat. Ce que ces investisseurs reprochent à VW, rapporte ClientEarth, c’est de jouer sur les deux bords : d’une part, l’entreprise promeut la transition vers une économie verte ; de l’autre, en tant que membre de nombreuses associations automobiles et commerciales, elle exercerait un lobbyisme incompatible avec ses idées écologiques.
Pour dissiper cette crainte, les actionnaires ont tenté, en vain, d’obtenir plus d’informations. Selon ClientEarth, les investisseurs susmentionnés ont décidé d’agir en justice après s’être vu opposer le véto de l’entreprise concernant l’introduction d’un point à l’ordre du jour de l’assemblée générale annuelle. La procédure doit détermine si Volkswagen AG avait le droit de refuser. Ainsi, une décision favorable aux investisseurs ne signifierait pas de facto des mesures écologiques plus fortes ou l’abandon du lobbyisme polluant de VW, mais améliorerait la responsabilité et la transparence des entreprises pour les actionnaires des sociétés allemandes.
L’article de ClientEarth, avec les interventions des fonds de pensions concernés, est disponible ici.
26 octobre 2022 | Internationales
Le 19 octobre 2022, 299 client·e·s soutenu·e·s par l’association TIAA Divest et le Center for International Environmental Law (CIEL) ont introduit une plainte contre le fonds de pension TIAA (Teachers Insurance and Annuity Association) et sa filiale de gestion des investissements Nuveen pour violation des Principes pour l’investissement responsable (PRI).
Les plaignant·e·s allèguent que les investissements substantiels de TIAA et Nuveen dans les combustibles fossiles et les matières premières liées à la déforestation violent leurs engagements en tant que signataires des PRI et sont incompatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris.
Partant, les plaignant·e·s enjoignent notamment TIAA et Nuveen à mesurer et à divulguer l’ensemble des émissions de leur portefeuille, à établir un moratoire sur les nouveaux investissements dans les combustibles fossiles, à renoncer à leurs investissements existants dans les combustibles fossiles d’ici à 2025 dans une mesure compatible avec un maintien du réchauffement climatique en deçà de 1,5 °C et à mettre fin à l’expropriation de terres entraînant la déforestation et des atteintes aux droit humains.
Le communiqué du CIEL est disponible ici.
13 octobre 2022 | Internationales
Situé à moins de 100 km au nord de Rome, le Lac de Vico est entouré de zones protégées par l’Union européenne en raison de leur riche biodiversité. ClientEarth rapporte toutefois que celle-ci est menacée par l’industrie de la noisette, qui a fait de la région du Latium une aire de production intensive, notamment grâce aux investissements massifs du groupe Ferrero (Nutella, Kinder, etc.). Pour ce faire, quantité de fertilisants et pesticides sont utilisés, ayant pour conséquence directe un fort impact sur le Lac de Vico et la nature environnante. Concrètement, les habitants de certaines villes n’ont, pour cette raison, plus d’accès direct à l’eau potable, et l’exploitation agricole future de la région est menacée.
ClientEarth a ainsi décidé de s’allier à l’organisation de protection de la nature et des oiseaux BirdLife Italy afin d’actionner en justice la région du Latium, les autorités du service des eaux, ainsi que deux communes, pour qu’elles se conforment à la législation européenne et nationale en protégeant efficacement le Lac de Vico et les personnes qui dépendent de ses ressources.
L’annonce de ClientEarth est disponible ici.
1 octobre 2022 | Internationales
L’agriculteur allemand Ulf Allhoff-Cramer s’appuie sur un arrêt de 2021 de la Cour constitutionnelle allemande, qui fait de la protection du climat un droit fondamental, pour tenter de contraindre le groupe à ne plus vendre que des voitures électriques à partir de 2030. D’ici-là, il réclame également une baisse des émissions de CO2 de 65% par rapport à 2018.
Greenpeace considère que Volkswagen n’a pas pris en compte les avertissements, formulés depuis 1983, concernant les dangers des émissions de gaz à effet de serre. Selon l’agriculteur, les sols plus secs et les pluies plus abondantes dus au changement climatique nuisent à son activité. Il considère que Volkswagen est en partie responsable de cette situation, car la production massive de véhicules fonctionnant à l’essence et au diesel contribue de manière significative aux émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
Selon Geo, le groupe Volkswagen estime la requête infondée et ajoute que « dans un système démocratique, les décisions majeures sont à prendre par le législateur ».
Durant la première audience en mai 2022, les juges du tribunal de Detmold ont demandé au plaignant de fournir des détails supplémentaires pour étayer ses arguments juridiques. Le 9 septembre 2022, les juges ont à nouveau demandé des informations supplémentaires et fixé une nouvelle audience au 3 février 2023.
Des procédures similaires ont été introduites à l’encontre des autres grands constructeurs allemands Mercedes-Benz et BMW.
28 septembre 2022 | Internationales
En 2019, des habitants des îles du Détroit de Torrès, particulièrement vulnérables aux effets du changement climatique, ont déposé une action contre l’Australie devant le Comité des droits de l’Homme de l’ONU. ClientEarth rapporte que ces habitants reprochent au gouvernement de ne pas avoir agi contre le réchauffement climatique, qui a causé, entre autres, de multiples inondations et l’érosion de la faune et la flore marine entourant l’île.
Cette inaction constituerait, aux yeux des demandeurs, une violation de leur droit à la vie, à la famille et à leur vie culturelle en tant que minorité ; autant de droits qui sont protégés par le Pacte de l’ONU sur les droits civils et politiques.
Le 23 septembre 2022, le Comité des droits de l’Homme de l’ONU a accepté cette requête. The Guardian rapporte que les griefs de droit à la famille et à la vie culturelle ont été retenus, mais pas celui concernant le droit à la vie. Cela a toutefois suffi pour que le Comité ordonne à l’Australie de compenser les dommages subis par le peuple des îles du Détroit de Torrès et d’agir pour protéger l’existence de ces communautés. ClientEarth insiste sur le caractère unique et important de ce procès qui est une première sur toute la ligne : première violation des droits humains par un pays en raison de son inaction climatique, première nation rendue responsable pour ses pollutions sous l’angle des lois sur les droits de l’Homme, et premier peuple indigène dont il est admis que le droit à la vie culturelle est mis en danger par le changement climatique. L’avocate de ClientEarth qui représentait ces habitants décrit ce procès comme une victoire historique, tant pour la justice climatique que pour les populations les plus vulnérables.
L’article de ClientEarth est disponible ici et celui de The Guardian ici.
25 septembre 2022 | Internationales
Dans la multitude de procès climatiques que le Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment du London School of Economics and Political Science avait répertoriés plus tôt cette année, des chercheurs de cette même institution ont analysé plus spécifiquement les procédures dans lesquelles des aspects d’une politique climatique globale gouvernementale sont remis en cause (procédures dites Framework litigation, terme qui renvoie au Framework legislation, utilisé pour décrire l’ensemble des lois liées à la politique climatique d’une région). L’objet de ces procédures est donc très large et ne se contente pas d’aborder un point problématique en particulier, mais bien l’ensemble de la politique des autorités locales.
Les 80 procès contre les politiques gouvernementales que recensent les chercheurs ont particulièrement lieu en Amérique du Nord ainsi qu’en Europe. Nous pouvons toutefois citer l’Australie, le Pakistan, l’Inde ou le Brésil comme autres grands pays ayant connu ce type de procédure. Ces procédures ont généralement plusieurs points communs. Sur le fond, elles se réfèrent à un objectif d’augmentation maximal de la température basé sur l’Accord de Paris (+ 2°C) et se focalisent sur la production ainsi que la consommation d’énergies fossiles – plus rarement, sur la déforestation. Sur la forme, elles sont majoritairement portées par des individus et/ou des ONG, aidés financièrement par des crowdfunding ou des fondations philanthropiques, et accusent des gouvernements nationaux ou régionaux.
Plusieurs études tendent à montrer que les tribunaux peuvent jouer un rôle important tant dans le renforcement de politiques climatiques décidées que dans les ambitions gouvernementales en matière de protection du climat. En effet, bien que la proportion d’issus favorables au climat de ces procès soit faible en première instance (autour de 1/3), le taux augmente à 7/9 devant les cours suprêmes. Ces succès ont alors concrètement des impacts : le rapport cite trois cas aux Pays-Bas, en Allemagne et en Irlande où, à la suite d’un procès perdu par le gouvernement, ce dernier a mis en place de nouvelles politiques en matière de climat. Indirectement, les jugements auraient un second effet : celui d’encourager les gouvernements à agir, par peur de voir leur inaction sanctionnée. Le rapport montre à ce propos que, des actions climatiques contre une politique gouvernementale étant en cours, les autorités ont plusieurs fois légiféré en faveur du climat, alors même que lesdites actions ont finalement été rejetées. Toutefois, les chercheurs rappellent que le changement de politique causé par ces procès peut parfois servir aux entreprises très polluantes de demander des compensations en argent, pour violation des accords internationaux d’investissement.
Ainsi, de nombreux procès climatiques contre les politiques gouvernementales verront leur décision être rendue dans les prochaines années. Parallèlement, des actions contre les politiques cadres d’entreprises s’inspirent des stratégies utilisées contre les gouvernements, à l’exemple de l’affaire Milieudefensie et al. v. Royal Dutch Shell.
En Suisse, l’association « Aînées pour la protection du climat Suisse » a déposé une requête contre le gouvernement, qui n’aurait pas fixé d’objectifs climatiques conformes au droit international en matière de climat. Le DETEC n’y a cependant pas donné suite, ce qui a été validé par le Tribunal fédéral. Les Aînées pour la protection du climat Suisse ont adressé une requête à la CEDH, plus haute instance européenne, dont la Grande chambre s’est saisie de l’affaire.
Le rapport complet du Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment de la London School of Economics and Political Science est disponible ici, et les points clés sont présentés ici.